• -Les mendiants

    Le mendiant est un personnage important dans la société bretonne, du moins le mendiant attiré qui a ses tournées régulières, ses jours de visite, ses maisons où on lui fait bon accueil. N'est-il pas l'intermédiaire privilégié vers Dieu? C'est en se présentant comme les envoyés des défunts (anaon) ou de Jésus que, la nuit de la Toussaint, des groupes de mendiants parcourent une large moitié méridionale de la Basse-Bretagne pour solliciter des prières, une pratique qui n'a parfois disparu qu'au début du XX siècle. Ces quêtes, souvent chantées, soulignent d'autres temps forts du calendrier, notamment le changement d'année qui voit des mendiants se présenter aux portes pour solliciter leurs étrennes (kalanna, kouignaoua, eginad): leurs chants, souvent des noëls, et les souhaits qui les accompagnent sont perçus comme de réelles contreparties à la nourriture qu'on leur remet.

    -Les mendiants

    Les mendiants marquent également de leur présence les grands moments de l'existence: chargés parfois de réciter les prières (grasoù) lors des de la veillée mortuaire, ils assistent aux funérailles. Ils sont également présents lors des mariages, pour lesquels ils servent parfois d'entremetteurs (bazvalan): un jour leur est réservé , où les mariés les servent et font danser.  

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    Le mendiant, que le collecteur François Cadic intègre à sa galerie des métiers, exerce effectivement une profession, et ce dès le XV siècle, que l'on se transmet parfois de génération en génération; celle-ci s'accompagne parfois d'activités annexes: Margueritte Philippe, la conteuse-chanteuse de François-Marie Uzel et d'Anatole le Braz, est pèlerine par procuration, Barbe Tassel porte les dépêches télégraphiques, Jean-Marie Bourlot, le mendiant aveugle de Bieuzy-les-Eaux, règle et répare les horloges! D'autres comme Pier an Dall, l'aveugle de Corlay, ou Matilin an Dall, le fameux sonneur de Quimperlé, Jack Coigniel, le violoniste-chanteur de Séniel, sont des musiciens réputés. Colporteurs de nouvelles, les mendiants fournissent également nombre de chanteurs et conteurs à l'image de l'aveugle Ian ar Gwenn. Au XVIII siècle les prophéties du roi Stevan parcourent tout le pays de Vannes et d'Auray.

    -Les mendiants

    Les mendiants, qui constituent encore plus de 6% de la population (40000 mendiants dans le Finistère ou les Côtes-du-Nord vers 1830, 9% au XVIII siècle), bénéficient d'une forme d'intégration sociale et sont acceptés par la population, alors même que les autorités multiplient les arrêtés interdisant la mendicité et mettent en place les organismes d'assistance pour les plus démunis, soulignant l'existence d'une mendicité agressive, ou la présence de faux mendiants. La foule des mendiants qui les jours de pardon, exhibent leurs handicaps à la sortie de l'office pour attiser la générosité des fidèles, devient au cours du XIX siècle un type du pittoresque breton qui contribuent à véhiculer les écrivains, les peintres, les graveurs, les photographes et éditeurs de cartes postal.  

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    Cette représentation quelque peu idyllique exprime une spécificité bretonne, en tout cas rurale et bas-bretonne, mais elle masque trop souvent une autre réalité, parfaitement banale et bien plus dramatique, celle des pauvres, des infirmes, des victimes des crises économiques réduits, bien malgré eux, à une mendicité mal vécue, et mal acceptée par la société citadine et ses villes lors des épidémies des XVI et XVII siècles, ou ces miséreux issus des campagnes bretonnes qui, au XIX siècle, viennent se livrer à la prostitution, quémander leur survie et finalement, bien souvent, mourir dans les grandes villes dans le mépris et l'indifférence quasi générales.  

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